VOIR, AUTREMENT

Comment « voir », quand on a perdu la vue. Comment évoluer dans une société qui n’a jamais été autant portée sur le visuel. Comment percevoir le monde, autrement.

Ce projet documentaire — qu’elles soient nées aveugles, ou qu’elles aient perdu la vue au cours de leur vie — témoigne du quotidien et de la résilience de personnes atteintes de cécité partielle ou totale. Cette série raconte leurs histoires et amène à s’interroger sur la notion de « vision ».

Marc-André (50 ans) a perdu la vue à l’âge de 46 ans, des suites de ce qui aurait été un empoisonnement aux produits aérosols chimiques, alors qu’il vivait en Thaïlande. Pour lui, il n’a pas seulement « perdu la vue, mais aussi tout son mode de vie ». Véritable homme de lettres et grand voyageur, Marc-André a passé plus de 20 ans à vivre à travers l’Asie — du Japon à la Thaïlande, en passant par la Birmanie. À la suite de son handicap, il est revenu s’installer, il y a quelques années, dans son Montréal natal où s’écrit désormais un nouveau chapitre de sa vie.  

Aujourd’hui, Marc-André travaille comme agent de développement pour l’organisme Le Bon Pilote et s’implique quotidiennement auprès de nombreuses associations qui œuvrent à favoriser l’accessibilité et le lien social pour les personnes en situation de handicap.

« Qu’est-ce que tu veux, je ne vais pas rester chez moi à regarder les murs. De toute façon, je ne les vois pas », me répond-t-il de sa pointe d’humour lorsque je lui fais remarquer son emploi du temps de ministre.

Marie (23 ans) est aveugle de naissance. Originaire de Mascouche, elle est venue s’installer seule à Montréal à ses 20 ans pour ses études. « Ça a été le début de beaucoup de responsabilités, surtout quand tu es handicapée », confie-t-elle. Étudiante en Sciences Politiques à l’Université de Montréal (UDEM), Marie aspire à travailler en diplomatie — elle, qui a fait le deuil, plus jeune, de ne pas pouvoir exercer le métier de ses rêves : celui de puéricultrice.

Face à son handicap, Marie est en perpétuelle quête d’autonomie et de liberté. Elle préfère se déplacer en transport en commun ou en Uber, bien qu’elle ait droit au service de transports adaptés. Équitation, danse, natation, musique, et même bricolage, Marie est une touche-à-tout, dotée d’une grande curiosité, sociabilité et d’un esprit critique. Elle se sent véritablement « handicapée » lorsque la société impose des limites d’accessibilité. 

Marie s’est souvent demandé à quoi ça pouvait bien ressembler de voir. « Si un jour, je croise Dieu, je lui demanderai », ironise-t-elle. 

Au Québec, on compte près de 100 000 personnes non-voyantes et malvoyantes, dont la très grande majorité vit sous le seuil de pauvreté.

De nombreux organismes locaux comme, la Fondation des Aveugles du Québec (FAQ), œuvrent au quotidien pour briser la pauvreté et l’isolement vécus par les personnes atteintes de déficience visuelle, et renforcer l’intégration sociale et communautaire. 

Chaque année, la FAQ repousse les limites de l’accessibilité en proposant une grande palette d’activités sportives et récréatives pour les 6-25 ans (ski alpin, tourisme, vélo tandem, deltaplane, cours de cuisine, cours de musique etc…) Alors, que plus de 80% des informations que nous recevons sont d’ordre visuel, ces activités sont aussi importantes pour aider les plus jeunes à développer leurs habiletés sociales et cognitives.

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